Gaël Faye
Je ne lis pas beaucoup en ce moment. Le boulot, les enfants, les travaux dans la maison, je manque de disponibilité. J’ai mis longtemps à lire Petit Pays, alors que c’est un petit bouquin, et j’ai mis longtemps à écrire ces mots, alors que c’est un grand roman.
Gaël Faye y raconte son enfance, à peine déguisée : le héros s’appelle Gabriel, comme lui, il est le fils d’un père français parti se balader un peu loin sur son vélo (écouter « Pili pili sur un croissant au beurre ») et d’une mère rwandaise tutsi exilée au Burundi (écouter beaucoup d’autres de ses chansons). Le temps de son enfance tout à fait joyeuse et insouciante au Burundi est un peu laborieux à lire : l’écriture très descriptive dilue souvent le récit sous la précision des lieux, des arbres, des rues, ou des sensations, des odeurs et des bruits, avec une acuité qui force le naturel. Les faits et les personnages passent parfois au second plan, et malgré des chapitres courts concentrés sur un épisode, j’ai eu un peu de mal à suivre ce gamin et sa bande au fond de leur impasse.
La suite est douloureuse. Pour le coup, Gaël Faye nous fait basculer avec lui enfant dans la tension, puis la violence inouïe qui déchirent le Rwanda et par ricochet le Burundi, et ça prend aux tripes. C’est douloureux, c’est marquant, et c’est nécessaire, parce que ça met des visages, de la chair, une réalité portée par ces personnages, ces enfants, ces femmes, ces hommes, sur le peu que je connaissais du génocide des Tutsis.
Je suis resté frappé, marqué par cette émotion puissante, par ce témoignage intime de l’infinie violence des hommes, qui a ravagé ces petits pays. Et pour ça, malgré la grande tristesse qu’il contient et qu’il transmet, je suis heureux d’avoir lu ce livre.
Thomas